Solicaire

Theodoro

enfant en difficulte temoignage

*Les noms, lieux et photos ont volontairement été modifiés.

Theodoro

T est arrivé de M à l’âge de 5 ans, adopté avec son frère par une famille française par l’intermédiaire d’une ONG bien connue dans les procédures d’adoption internationale.
Quand les parents racontent le parcours du combattant qu’a été l’adoption de leurs deux enfants issus d’une fratrie, en entretien ils ne se rendent parfois pas compte que
l’évocation de la mère biologique des enfants surtout en leur présence est un exercice périlleux.

Les méandres des dispositifs locaux d’adoption qui travaille avec les parents étrangers souhaitant adopter ont laissé un goût amer à ses parents, qui doivent aujourd’hui faire face aux difficultés des deux frères, dont l’un est pris en charge par mes soins à raison de 6 semaines renouvelables nous sommes au deuxième trimestre. De sa M natale il reste à T le souvenir d’une mère, dont il a des bribes de souvenirs, souvenirs qu’il ne souhaite pas partager surtout avec moi.

T a été admis à l’âge de 9 ans, T est en CM1 et je vais le voir à l’école 2 fois par semaine pendant une heure, j’interviens en remédiation scolaire pour des difficultés d’apprentissage, à raison de 2 à 4 heures au domicile pour de la remédiation relationnelle, je travaille au domicile en partenariat avec une enseignante spécialisée de l’éducation nationale.

À l’école chaque séance de remédiation débute par un rituel (qui peut changer en fonction de l’humeur du jour de T). T va chercher un livre dans les rayons de la bibliothèque, l’endroit où nous travaillons souvent, il cherche un livre, au bout d’un certain temps après que le minuteur a sonné, il revient, se pose devant moi, me regarde l’air de dire: « tu veux que je te raconte quoi aujourd’hui ? ».

En effet, chaque activité durant nos séances de remédiation scolaire est rythmée par un médiateur voire plusieurs, celui qui ne change pas c’est le temps représenté physiquement par le minuteur.
Les émotions que T traverse rythment nos séances, elles dépendent du temps, du début et la fin chaque étape de la séance de remédiation, on peut commencer par une activité, un jeu, une discussion, une bouderie, un dessin. Les limites T les a intégré (on ne crie pas on ne sort pas )…

La fin des séances de remédiation est toujours prévues 5 minutes avant la récréation, en accord avec l’école et le professeur. J’interviens avant la récréation pour permettre à T de sortir de la classe, et que le groupe/classe fasse sans lui et T sans eux. C’est toujours un moment difficile à négocier avec T qui le manifeste selon son humeur, par le refus de sortir du groupe ou à l’inverse il se rue sur la porte à peine l’ai-je ouverte.

Quand Je le ramène en classe à la fin de la séance, je m’assure qu’il rejoint sa place et je dis ostensiblement au revoir à tous, un rituel immuable avec un petit mot au professeur pour à nouveau renforcer positivement le comportement de T. Le problème de T est de pouvoir rester en place plus de 5 minutes sans chercher à se lever pour interagir avec les autres élèves. Il cherche à attirer l’attention de son professeur par tous les moyens. C’est pour cette raison que l’école qui accueille le petit garçon et l’intervenant social, ont signé un Projet d’Accompagnement Individuel
(PAI) qui fixe les modalités, les objectifs, les modalités d’évaluation de la prestation de remédiation scolaire. T est reconnu comme enfant situation de handicap à ce titre, en plus du PAI, il
bénéficie d’un PPC (Projet de Compensation du Handicap), qui permet aux parents de bénéficier de prestations de veille, d’observation à domicile. Cette année il a de la chance car il est dans une classe qui sert de terrain de stage à des étudiants qui viennent à l’école pour devenir professeur des écoles. Le professeur a organisé sa classe en deux espaces, l’un où les élèves sont assis à
leurs place, le second qui est une petite pièce attenante où les élèves se retrouvent quand ils ont fini leur exercice. Un endroit q où ils peuvent lire, dessiner, parler à voix basse entre élèves, puis revenir dans la classe.

Quand je viens chercher T pour nos séances de remédiation scolaire, je remarque parfois qu’il a été changé de place afin de se rapprocher d’un autre élève. Son instituteur m’explique brièvement ce qui lie les deux élèves et renforce ainsi positivement T, qui est toujours à l’affût de ce que l’on dit de lui, même s’il fait mine de ne pas s’en soucier. Il a fallu du temps pour que s’établisse une relation de confiance avec T, mais rien n’est acquis, il faut être inventif et à l’écoute.

J’interviens à domicile pour une durée de 2 à 4 heures par semaine pour permettre aux parents de T de souffler un peu. Je travaille avec l’enseignante spécialisée qui reprend avec T les apprentissages appris à l’école au domicile pendant une heure. Après son départ, nous entamons notre séance de remédiation relationnelle au domicile. Je me souviens par exemple du temps passé au nettoyage du mur de la chambre de T sur laquelle il a commencé à dessiner, écrire, comme pour toute activité nous « faisons ensemble » ce qui est très important les consignes étant données avant tout chantier de réparation des dégradations de T, la séance d’après nous allons réparer le trou que T a fait dans la porte de sa chambre en l’enfonçant lors d’une crise de colère.
La sonnerie du minuteur vient de retentir nous allons voir si le gâteau que nous avons fait ensemble est cuit.

C’est l’heure du retour de l’un des parents qui va prendre le relais de l’intervenant social à domicile. Le relais, ou répit des parents aidants leurs enfants à domicile est le continium de prestations de remédiation éducatives en libéral.

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